Venant de Saint-Pétersbourg, j’arrive à Moscou à la gare de… Léningrad, la plus ancienne (1851) des neuf principales gares de la capitale russe, toutes situées près du centre, non loin de la ceinture des Jardins qui constituait la limite de la ville à l’époque de leur création. Une belle effervescence anime la place Komsomolskaïa, dite place des Trois-Gares, où la « mienne » voisine avec celles de Iaroslavl et de Kazan, terminus de différentes branches du Transsibérien. J’ai quelques heures devant moi pour découvrir Moscou, avant de prendre demain le train mythique à la gare de Iaroslav dont l‘énoncé des dessertes me laisse toujours rêveur : Sibérie, Extrême-Orient russe, Chine et Mongolie…
Je prends le métro en direction de la Place Rouge. Noyé dans une marée humaine, je suis seul à tourner la tête dans tous les sens pour trouver mon chemin, alors que les Russes suivent leurs flux habituels. Si les wagons du métro de Moscou ne sont pas décorés de photos de Versailles comme ceux du RER C à Paris, ils leur ressemblent.
Les stations sont vastes, bien éclairées et souvent magnifiquement décorées. Staline a d’une certaine façon réussi à en faire le « Palais du Peuple » ! On me regarde à peine, les Moscovites ayant désormais l’habitude de voir des touristes étrangers, y compris dans le métro à l’heure de pointe. Je me perds dans ses couloirs et finit par me faire guider par deux policiers vers la sortie qui débouche devant le Kremlin.
J’ai une telle connaissance littéraire du Kremlin qu’il n’est pas une surprise.
Il est très beau même si, n’en déplaise aux fans de Bécaud, la Place Rouge n’est pas blanche : pas de neige sur le sol, ni d’ailleurs de Nathalie. Le froid plus que vivifiant est lui bien là !
Mon regard s’attarde sur un couple qui sort du Goum, la célèbre galerie commerçante, en savourant des glaces. Comment ont-ils pu en avoir envie par ce temps ?
Mystère. Et soudain voilà que moi-aussi j’ai envie d’une glace…
Je me rends à pied jusqu’à la cathédrale du Christ-Sauveur. C’est une imposante réplique de celle rasée à la Révolution. On entre en passant sous un portique de sécurité.
L’intérieur tout de granit, or et argent foisonne de matières précieuses ; on s’y sent un peu comme dans un mausolée. Les Russes avaient sans doute besoin de la ressusciter dans sa solennité pour faire leur deuil des temps maudits. Rien à voir avec cette petite église en reconstruction dans un autre quartier, aux fresques encore visibles mais défraîchies par le temps et… les légumes, souvenir de son passé de hangar soviétique.
Sentimental, je prends ensuite la direction du Café Pouchkine, lieu accueillant, douillet et très chic.
C’est à la fois une pharmacie, une librairie, un salon de thé et un restaurant gastronomique. Ce dernier offre une carte étoffée de gourmandises franco-russes. Sur le conseil d’une voisine, je choisis un medovick, dessert typique composé d’un biscuit parfumé au miel de sarrasin, de confiture de lait (sgouschonka) et de crème fraîche très parfumée (smetana). J’apprécie particulièrement l’association de la fine aigreur de la smetana au goût puissant du miel de sarrasin.
Le Café Pouchkine est en fait récent. Né de la chanson de Bécaud, ce temple du raffinement à l’ancienne, évocateur de l’époque de l’Alliance franco-russe, est installé dans un ancien hôtel particulier.
La rue Tverskaya me conduit jusqu’au théâtre Bolchoï, symbole affirmé de la culture russe et soviétique. C’est un lieu de pèlerinage pour les amateurs de musique et de danse, un temple où s’expriment la beauté, la poésie du corps, l’excellence…
Mais une ancienne danseuse m’en a aussi raconté l’ambiance, faite de concurrence sans pitié pour s’y faire voir et remarquer. Ecole de vie, lieu d’une féroce guerre des nerfs où la force morale prévaut sur la force physique. Le ballet auquel j’assiste n’en laisse rien voir. C’est un moment de grâce servi par des créatures angéliques que l’on ne peut imaginer que douces et tendres.
Je complète ma découverte par une visite « privée » des coulisses. Il est interdit d’y faire le moindre bruit. Je me transforme en petit rat silencieux pour parcourir les loges, scènes, studios, salles d’entrainement et de concert, en terminant par un atelier où l’on habille les cygnes. Il est émouvant de pouvoir en effleurer la beauté.
Moscou me laisse un souvenir puissant. Cette ville dégage à l’évidence de la force et de la fierté.
A suivre…
Paul
La Russie en train (1/5) Saint-Pétersbourg
En Transsibérien (3/5) de Moscou à Ekaterinbourg
Grand Transsibérien à la carte
Sébastien
Sébastien, notre cher collègue est passionné de voyages et d’écriture, il contribue notamment à la communication de Nord Espaces.
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