Pris dans les glaces du Groenland, le Manguier fut l’hiver dernier le berceau de ruptures créatrices. Belle reconversion pour cet ancien remorqueur de la Marine Nationale, réhabilité en navire d’expédition et résidence d’artistes par son capitaine Philippe Hercher. Ils étaient huit sélectionnés pour ce voyage. Qui est l’auteur de ces photographies bouleversantes ? Quelle est cette âme d’artiste ? Que ressent-on après cette expérience hors du commun ? Nous sommes allés à la rencontre de Férial. Née en 1965, parisienne de mère, kabyle de père, elle est diplômée des Arts décoratifs de Nice (Villa Arson) et de l’école d’Art Beaubourg (Paris), dont elle sortit major de promotion avec une thèse sur Serge Gainsbourg. Libre et utopiste, elle fut photographe officielle de Patti Smith en 2016 et du Festival des Nuits du Sud de Vence, qui programme depuis 20 ans des artistes prestigieux du monde entier (John Baez, Jimmy Cliff, Nile Rodgers, Kéziah Jones, Bernard Lavilliers etc…). Cédons-lui la parole…
« Je reviens d’un voyage aussi extraordinaire qu’extrême…
Les conditions climatiques, la promiscuité dans le bateau, l’isolement et la solitude ont étroitement flirté avec le magnifique, l’irréel, l’extraordinaire et le sublime. Après un mois passé au cœur de l’Arctique, je reviens dans le monde agité, bruyant et encombré des villes. Mon regard sur la vie a changé : il a été bouleversé dans son approche, ses certitudes et ses souhaits. Ce voyage nourrira mon projet et sera un témoignage du vivant sous toutes ses formes : faune, flore, éléments et humains. L’eau, la glace, les flocons m’ont connectée à nouveau à la vie en me rappelant qu’ils étaient à l’origine de toute chose.
Une curiosité insatiable et une ferveur quasi mystique nourrissent ma quête artistique. Elles m’ont poussée vers cette aventure. J’arpente depuis toujours le chemin des broussailles germinales, me ressource dans les avant-gardes planétaires, laboure les nostalgies régénératrices, butine les fleurs de la Beat Génération et de la Pop Music. J’aime extraire du cœur des Hommes l’émotion dont ils sont les étoffes. En y regardant bien, n’est-il pas écrit dans les contes que chaque être possède une âme ?
In fine, mon projet se présentera sous la forme d’une série d’expositions et d’un livre intitulé Murmures des corbeaux. Une histoire à raconter, la mienne bien entendu, mais aussi celle des compagnons de route. J’ai souvent été inspirée par les mythes, légendes et contes fantastiques. Ils sont une source indéniablement magique, symbolique, ésotérique et pleine d’humanité. J’ai repris le fil de mes inspirations passées et, très rapidement, mon chemin s’est éclairé. Je puise dans les souvenirs de cette résidence, mon imaginaire et celui des peuples nordiques. Le fil conducteur de mon livre sera ainsi le mythe des deux corbeaux – oiseau emblématique du Groenland – sur les épaules d’Odin. L’un représentant la mémoire, l’autre l’âme. Car si je regarde l’ensemble de mon travail, il a toujours porté sur ces deux thèmes. Pendant la résidence, un parallèle métaphorique s’est opéré entre les rencontres, l’isolement, les éléments, la lumière, la faune, la flore et le mythe d’Odin et de ses corbeaux. »
Par Férial pour Nord Espaces
Julia Snegur
Julia, diplômée en sociologie et en géopolitique, grande voyageuse, notre chère collègue et responsable de la communication
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