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A 500 bornes de Moscou…

12 juillet 2017
  • Récits & Carnets de voyage

JUIN 2017. Il y avait un temps où mon père levait les yeux au ciel en nous voyant, ma mère et moi, débarquer avec nos valises. Qu’il s’agisse d’un voyage de 4 jours ou de 2 semaines, nos valises étaient toujours aussi énormes et lourdes… Cette fois pour mon « voyage insolite en Russie » de 4 jours à 500 bornes de Moscou, je voyage léger. J’ai droit à 8 kilos en cabine, je ne veux rien mettre en soute, mais j’arrive à caser dans mon sac à dos Hedgren l’ordinateur portable, les deux téléphones, l’appareil photo et tous les chargeurs. Si je laisse de côté la petite robe noire, j’emmène quand même quelques produits cosmétiques.

A ma correspondance à Zurich je me fais confisquer mes papiers sans explication. Après bien des recherches, rassuré sur mon identité opaque, un officier suisse me rend mon passeport ; je lui serre la main ; étonné, il me souhaite bon voyage.

Arrivée à Moscou, j’embarque à bord d’un train de nuit à l’une des 9 gares de la capitale russe, celle dite de Riga.

 

Là aussi, je voyage en éco et cela me rappelle mes années de jeunesse : wagon-lits de 46 couchettes avec des commodités rudimentaires et une hôtesse à l’allure d’un vigile de prison. Dans mon compartiment, 3 dames d’une cinquantaine d’années, amies d’enfance, voyagent ensemble pour retrouver leurs anciens camarades de classe et fêter l’anniversaire de leur école. L’une entre elles est une beauté slave typique : yeux bleus, pommettes hautes, cheveux clairs, regard bienveillant de mère. La seconde me rappelle une actrice soviétique Gourtchenko, coquette, qui ne lâche rien malgré son âge. La troisième est ronde, cheveux courts colorés ; elle a « tout compris de la vie » tirant des conclusions définitives. Connaissance faite, nous passons à une séquence « nostalgie » avec des souvenirs innombrables aussi drôles qu’étonnants de l’époque révolue ; je les trouve belles toutes les 3 dans leur élan sentimental. Suit une séquence gastronomique où chacune déballe sa pitance et partage son repas du soir.

Bientôt le wagon se transforme en dortoir où les gens occupent des lits bas et des lits superposés : quelques caprices d’enfants, quelques grognements, quelques chuchotements de tendresse, quelques « ténors » en ronflement. Moi aussi je grimpe dans mon lit en escaladant les portillons de cet open space. La nuit est tombée…pendant quelques minutes encore la lumière aveuglante des lampadaires des voies ferrées nous arrache à la nuit avant de nous abandonner à notre sort définitivement.

J’aime dormir dans le train, mais étouffée par la chaleur, je quitte mon espace pour traverser le wagon plein à craquer et rejoindre le « tambour » : 45 corps en sommeil…45 âmes… 45 destins… Je manœuvre entre les pieds qui dépassent gênant le passage, les draps qui pendouillent ; je pose enfin ma main sur la poignée fraiche de la porte menant dans le tambour. On l’appelle ainsi parce que le bruit ici est assourdissant et il est encore plus insupportable à la jonction de deux wagons où on voit filer les rails à toute vitesse et où en hiver la neige s’infiltre à l’intérieur. Je suis juste là, sur deux feuilles de métal superposées, à profiter de la fraicheur nocturne accompagnée par la canonnade des roues.

Revenue à ma couchette, après quelques heures de sommeil, j’abandonne mes compagnes de voyage, mes trois grâces endormies. Je descends à 4 heures du matin sur le quai défoncé d’une station ferroviaire. Il fait déjà assez clair, mais un épais brouillard recouvre la petite gare peinte en vert et étouffe la lumière d’un lampadaire solitaire. L’arrêt n’a duré que 2 minutes, le train est reparti, disparu dans le brouillard mais on entendait encore longtemps le bruit sourd de la mécanique.

Contrairement à ce qui était prévu, personne ne m’attendait. En réalité j’étais contente de pouvoir m’abandonner aux circonstances et de laisser faire la vie. Je bénis cet imprévu dans ma tête. Plus encore ça me motivait. Mon point de chute est à 70 km. En contournant la gare j’ai vu quelques voitures qui espéraient qu’un passager viendrait les solliciter. J’ai choisi celle d’un vieux monsieur en me disant qu’il pourra certainement me raconter des choses intéressantes sur la région.

Je ne me suis pas trompée : il m’a conté la passionnante histoire de cette ancienne cité commerçante du XVème siècle où j’arrivais, montré les 3 magnifiques églises et mis en garde contre quelques vilaines plantes urticantes locales.

 

 

 

La route était pénible : la pluie de la veille avait creusé de trous dans la chaussée et par moment la voiture dérapait fortement. Je n’ai pas mis ma ceinture de sécurité par peur de vexer cet ancien chauffeur routier. Elles ont leur propre esthétique, ces routes de campagnes défoncées, avec la brume épaisse qui stagne au-dessus et dans les champs autour. Parfois je devinais dans ce coton de petits villages et j’ai vite compris, avec tristesse, que ça faisait longtemps que la vie avait déserté ces maisons. Disposées par deux sur la façade principale, les fenêtres « brodées » par des artisans menuisiers n’avait plus de vitre, de rideaux, de fleurs, leur regard éteint de toute beauté malgré des pommiers laissés eux-aussi à l’abandon dans le verger devenu sauvage.

Au bout de deux heures nous sommes arrivés…

Les drapeaux russes étaient ingénieusement montés sur les poteaux à côté d’une maison en bois… Mon voyage insolite en Russie commence ici  à 500 bornes de Moscou….à suivre… ( précédent) Suivant

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Julia Snegur

Julia, diplômée en sociologie et en géopolitique, grande voyageuse, notre chère collègue et responsable de la communication

A propos de l'auteur

Julia Snegur

Julia, diplômée en sociologie et en géopolitique, grande voyageuse, notre chère collègue et responsable de la communication

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